Tu es blond. Tu es grand. Et tu aimes ça. Tu aime ta peau douce, ta peau beige que toutes les jolies filles du coin complimentent. Tu souris lorsqu’elles te disent à quel point tu es beau, tu ris légèrement lorsqu’elles rougissent. Tu n’es pas gêné. Tu soignes ton apparence juste pour ce genre de mots qu’elles prononcent à ton égard. Tu as du succès et tu le vis bien. Seulement tu voudrais qu’elles ne remarquent pas que ce visage extérieur que tu affiches en permanence. Cette mine blasée et sûre d’elle dans le fond tu la hais. Ton vrai visage doux et sensible est bien mieux. Mais jamais tu ne changeras ça, après tout c’est ton identité. Les autres te définissent charmant, froid et distant et ils ne te connaissent pas d’une quelconque autre façon. Alors tu vis avec. Tu te caches bien au fond à l’intérieur de toi et ces iris sombres que tu arbores lorsque tu es normal, tu tentes vainement de les garder à l’ordre du jour. Mais parfois le contrôle t’échappes et ils deviennent rouges pastel ou encore dorés. Bleus aussi mais il vaut mieux ne jamais que cela arrive et tu le sais très bien. Alors tu travailles dur chaque jour pour éviter le drame.

Ce que tu sais aussi c’est que tes vêtements sont marginaux pour l’époque actuelle. Tu les as créés toi-même et tu n’accepterais tout l’or du monde pour les changer. Non. Tu as définitivement adopté cette chemise et ce nœud papillon. Tu idolâtres ce boléro et ce pantalon à pince et tu ne quitterais jamais cette paire de chaussures marron qui te donnent la classe comme tu le dis si bien. Tu mets tes goûts et tes couleurs préférées aux yeux de tous pour qu’eux tentent de mieux te connaître. Sans grand succès tu l’avoueras. Et parmi tous ces habits et accessoires que tu portes sur toi, ta pipe et tes lunettes de soleil bleues nuit sont tes favoris. Jamais tu ne les quitterais. Même en combat. Alors que pourtant dans ces cas-là, tu changes de tenue. Pour ne pas détruire ta création.

Dans ces moments-là tu optes pour la mode du jour. En restant toujours toi-même, classe et narcissique. Mais tu l’assumes et tu porte ce long yukata en tissu blanc avec passion. Torse nu, en-dessous tu préfères néanmoins mettre un Hakama de type pantalon noir ou couleur terre pour plus de facilité de mouvements et de sureté aussi. Mais tu n’oublies pas ce Obi clair et large que tu noues fièrement à ta taille en souriant. Ensuite tu enfiles gracieusement l’Haori blanc et bleu de ton père et tu remarques qu’il t’arrive aux genoux. Tu es heureux dans cette tenue, vraiment. Mais elle n’est pas complète. Il te manque cette paire de Tabi blanche et ces deux Geta de bois noirs pour te rendre parfait. Alors tu les mets et tu continues de t’admirer parce que tu es comme ça.

Tu es fidèle. Fidèle et lâche. Jamais tu n’hésites à faire tes coups dans le dos des gens mais jamais tu ne trahirais ton clan et ta patrie. Jamais tu n’abandonneras ceux qui te sont chers, qu’ils t’aiment ou te détestent. Tu n’es pas soumis mais tu obéis aux ordres. Enfin quelques fois, quand cela t’arranges. Sinon tu fais tout à ta sauce et tu n’hésites pas à répondre aux hauts placés si tu as quelque chose qui te dérange. Tu es casse-pied et grande gueule mais ils t’apprécient ainsi et te comprennent, dans le fond. Ils savent que tu as traversé toutes ces épreuves difficiles pour un nouveau né. Tu es quelqu’un de compréhensible qui retient facilement ce qu'on lui dit, sans en avoir l’air. Les gamins te trouvent ennuyeux et distant. Certains t’appellent Ice-man parce que tu ne parles pas souvent à ceux que tu ne connais pas. Tu ne te lies pas facilement et cela te pose problème quelques fois mais tu ne cherches pas à arranger les choses. Dans le fond, tu es très bien comme tu es. Tes soucis de vouvoiement en gênent plus d’un mais peu t’importe, tu ne sais que tutoyer. Ou presque. C’est pour cela que tu as obtenu cette réputation de chasseur sanguinaire de Kiri. Parce que tu possèdes un fort caractère et que tu es légèrement sadique. Le sang ne te fait pas peur mais tu hais te battre. Tu n’en montres rien bien entendu, ta fierté d’homme en prendrait un coup. Seulement tu connais tes limites et le jour où tu ne pourras plus, où tu n’auras plus le choix, tu te lâcheras avec plaisir. Dès lors, le monde comprendra que sous tes apparences de gars seul et abandonné, narcissique et qui rejette ceux qui viennent vers toi, tu n’es pas comme ça. Tu aimes la solitude et tu idolâtres ton physique, certes mais tu es gentil. Sensible. Un peu trop à ton goût d’ailleurs mais tu acceptes cette idée et tu vis avec. Tu aides discrètement ton entourage qu’ils soient voisins, amis ou même inconnus et tu fais de ton mieux pour que personne ne manque de rien. Tu n’apprécierais pas qu’ils arrêtent de te porter ce genre d’attention qu’ils avaient avant de découvrir. Tu préfèrerais mourir que d’être considéré comme un héro car après tout, tu n’as pas la grosse tête. Au contraire, tu adores faire la fête, boire et emmener les filles dans ton lit. Et ça, quoiqu’il arrive, tu ne le changerais pour rien au monde. Mais ça n’est pas tout. Tu es joueur, en combat tu prends ton temps et tu réfléchis avant d’agir. Quitte à passer quelques minutes à esquiver quelques assauts incessants. Penser en bougeant n’est pas un problème pour toi, une facilité que d’autres n’ont pas. Tu as un objectif, tu iras jusqu’au bout. Déterminé quoiqu’il arrive quoiqu’il t’en coûte. Ils te croient fou alors que tu n’es que l’ombre de toi-même. En façade. Un démon à l’extérieur, un grand gamin à l’intérieur. Et ceux qui le savent ne te donneraient au diable même pour tout l’or du monde. Tu es unique et tu le vaux bien.

Et sur un plateau d'argent, je vous prie. J’ai vu le jour à Yukan. Village aujourd’hui disparu des suites d’une attaque surprise ennemie. Mes parents ont perdus la vie le jour de ma naissance, lors de ce combat impitoyable, ne laissant aucuns survivants. Ou presque. Nous n’étions vraiment plus beaucoup. Peut-être dix, ou quinze. Sur un bon paquet à l’époque. Je ne possède pas énormément de souvenirs quant à cette journée de guerre, mise à part celui de cette dame morte en me protégeant.

Il y avait déjà du sang et du feu de tous les côtés et l’ennemi ne cessait d’abattre ceux qu’ils croisaient sur leur route. Ça criait, les villageois agonisaient et moi je pleurais. Nouveau né, c’était normal. Mais je braillais plutôt fort pour un gosse et un type au visage flou tenta de me poignarder tandis que j’étais dans mon berceau, à l’hôpital. Une dame se plaça entre lui et moi pour se prendre le coup et tua l’homme qui plus tard lui ôta la vie. Elle m’embarqua dans ses bras, chancelante en traversant les divers couloirs du lieu de soins pour finalement ouvrir une porte et entrer dans cette pièce qui nous servit de cachette jusqu’à la fin. J’ignorais qui elle était. Mais ses cheveux roux et son air maternel me faisaient penser à maman. Peut-être était-ce elle qui mourut à la suite de ses blessures, me serrant fort pour essayer de me calmer. Cette rivière de sang qui s’écoulait de son ventre se collait à moi mais je ne disais plus rien. Plus une larme, juste du silence. Quelques temps après je m’endormis profondément et ne me réveillais que plus tard dans ce qui serait la maison de ma meilleure amie.

La nuit je fais ce rêve étrange. Toujours le même. Je devais voir dix-sept ans et je combattais. C’était ce type qui avait tué cette jolie rousse m’ayant protégé à l’hôpital. Il m’avouait des choses invraisemblables, je n’y croyais pas. Et il me tuait comme ça, d’un coup bref et précis de katana. Ensuite je me réveillais, effrayé, haletant. Luna-Sempai venait me rassurer et je me rendormais, paisiblement. Tous les soirs. Même habitué après cinq ans, ce qu’il se passait ne changeait pas. Jamais.

Shûnji et Cana me rabâchaient sans cesses qu’il s’agissait d’un rêve prémonitoire mais je n’y croyais pas. La journée je préférais ne plus parler de tout ceci, jouer avec les jumeaux et grandir simplement comme le ferait un enfant normal. Seulement je ne l’étais peut-être pas et je ne voulais pas l’admettre. Je vivais ainsi depuis ma naissance, dans la famille la plus aimante du pays. Cana et Shûnji bien que parfaits faux-jumeaux et âgés d’un an de plus étaient adorables avec moi. Ils ne me laissaient jamais seuls, ils partageaient absolument tout. Le bien comme le mal. Et j’en faisais de même parce que nous nous étions fait cette promesse de ne jamais nous séparés tous les trois. Leur père, Hiroto-San nous apprit l’art du ninja. Il nous aida à nous perfectionner un minimum dans ce qui nous fût donné à la naissance, pour ma part le Taïjutsu était mon atout. À sept ans j’étais le meilleur dans ce domaine à l’école. Aussi, j’appris à soigner, comme pour rendre hommage à cette femme m’ayant sauvé de sa vie. Ce souvenir hanterait mon cœur et ma mémoire toute ma vie, je lui en serais à jamais reconnaissant.

En cour.